SUAP #3.1 : LES BILANS – Le Bilan Circonstanciel

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Le bilan circonstanciel est l’une des premières missions qu’un chef d’agrès doit accomplir. Aussi appelé « bilan d’ambiance » ou « bilan d’approche », il est réalisé dans les premières minutes après la présentation de l’équipe sur les lieux de l’intervention. Il doit résulter d’une analyse globale de la situation pour d’une part guider les premières actions, et d’autre part rendre compte au plus juste pour permettre l’adaptation de la réponse opérationnelle. 

Ainsi, la gestion d’une intervention résulte d’une collaboration et des différents comptes rendus entre le chef d’agrès et/ou le COS (Commandant des Opérations de Secours) et le CTA-CODIS. Dans le cadre des missions SUAP, cette collaboration intègre la régulation médicale territorialement compétente (SAMU). 

Rescue18 vous propose de poursuivre sa série d’articles SUAP avec ce nouveau volet dédié aux différents bilans. Dans cette première partie, voyons quels sont les modalités et les enjeux du bilan circonstanciel. 

1 – Analyser avant de s’engager

Un motif d’engagement SUAP peut, par manque d’information à l’appel, cacher une intervention plus dimensionnante. Cette remarque est également valable pour tout type d’intervention d’ailleurs…

Tout chef d’agrès d’un véhicule de secours à victime doit consacrer un temps d’analyse initial à son intervention, pour cerner et préciser sa nature, avant de définir les premières actions à réaliser. Ce temps lui permettra par ailleurs de rassembler les éléments du bilan circonstanciel. 

Sécurité du site

L’analyse de la situation permet d’identifier dans un premier temps s’il existe une menace extérieure persistante (suraccident, risque terroriste, effondrement, etc.), notamment lors de situations d’agression avec violence manifeste.

Ensuite, il s’agit d’analyser les risques éventuels liés au contexte : véhicules accidentés, structure instable, risque électrique, risque explosif, présence de substances toxiques.

L’objectif est de prendre rapidement des mesures pour sécuriser la zone d’intervention avant d’engager des personnels au contact de la ou des victimes et éviter tout suraccident. La sécurité des intervenants reste primordiale !

Les tiers présents sur les lieux devront ainsi être invités à suivre les consignes de sécurité.

Nature de l’intervention

Dès l’arrivée sur les lieux, il convient d’analyser attentivement la scène et de rechercher tous les éléments qui peuvent aider à déterminer la nature précise de l’intervention (accident, maladie, intoxication) et les circonstances de survenue : chronologiemécanisme et cinétique d’un accident ou d’une chute par exemple.   

Il s’agit également de compléter et de modifier, si besoin, les informations de départ sur la nature et le lieu de l’intervention, pour faciliter l’accès des renforts éventuels. 

2- Évaluer le nombre et l’état des victimes

Pour assurer la meilleure prise en charge de la ou des victimes, les moyens engagés devront être adaptés. 

Certaines  informations sont donc essentielles à transmettre :

  • le nombre de victimes
  • leur âge approximatif : on parlera davantage de nourrissons, enfant, adulte ou personne âgée 
  • leur état de gravité apparent 
  • la nature de leur atteinte (maladie, traumatisme, intoxication, brûlure).

Ce recueil nécessite parfois une reconnaissance approfondie des lieux (victime éjectée, plusieurs victimes dans des lieux différents, etc.). Il est donc essentiel de garder cette culture opérationnelle du « tour du feu » même en secours à victime pour ne rien occulter.

3 – Besoins en renforts

Si des renforts sont nécessaires, ils seront demandés immédiatement au moyen d’un message d’ambiance et/ou de demande de moyens supplémentaires grâce à l’évaluation rapide du bilan circonstanciel. Le chef d’agrès précisera si besoin une ZRM (zone de regroupement des moyens), les voies d’accès à privilégier, en intégrant dans le dispositif de déploiement des engins, le maintien d’une voie libre – axe logistique – pour faciliter l’évacuation des vecteurs vers les structures hospitalières. Le bilan circonstanciel requiert donc des capacités d’anticipation pour la suite de l’intervention.

4 – Les premières actions

C’est seulement après ce temps d’analyse globale qui tient compte des éventuels dangers et risques persistants, que le chef d’agrès pourra donner ses consignes d’engagement à son équipe :

  • EPI
  • Dégagement d’urgence 
  • Mise en sécurité
  • Bilan vital
  • Reconnaissance plus large de la scène (suspicion de défenestration ou d’éjecté par exemple)

Le chef d’agrès doit alors approfondir les données circonstancielles en interrogeant les témoins, les victimes et leur entourage. Tous ces éléments seront fondamentaux pour la compréhension du mécanisme d’un traumatisme ou de la survenue d’un malaise.

5 – Transmission du bilan circonstanciel

Le message d’ambiance qui résulte du bilan circonstanciel doit être transmis par radio, dans les premières minutes après présentation pour renseigner le commandement de la situation, tant sur le plan de la sécurité, que sur le plan de la réponse opérationnelle à apporter, selon le nombre et l’état des victimes. 

NB : Le moyen de transmission et les modalités sont selon le règlement opérationnel (RO) de votre SDIS.  

Ce bilan court et concis doit répondre à 5 questions

  • Que s’est-il passé ? ou de quoi s’agit-il? 
  • Existe-t-il un danger ?
  • Combien y a-t-il de victimes ?
  • Les secours sont-ils suffisants pour le moment ?
  • Les informations initiales sont-elles correctes ?

6 – Situation particulière intervention multi-victimes

En présence d’une situation avec de nombreuses victimes, il convient de le préciser rapidement au commandement.

Identifier l’origine est fondamental, notamment dans une situation d’agression par arme blanche ou arme à feu. La menace doit être recherchée et éliminée (si possible) avant tout engagement, grâce à l’intervention simultanée des forces de l’ordre. En cas d’impossibilité, la sécurité prime !

La demande de moyens complémentaires type NOVI  (Nombreuses Victimes) doit être effectuée même si le nombre exact ou l’état des victimes n’est pas encore connu. Le chef d’agrès peut transmettre un nombre à la dizaine.

Les interventions multi-victimes répondent à une doctrine de triage issue de la médecine de catastrophe et feront l’objet d’un article dédié.

7 – Les rôles d’un chef d’agrès SUAP dès les premières minutes

Savoir garder du recul pour analyser

Ces retours d’expérience et ces témoignages illustrent à quel point la mission d’un premier chef d’agrès est essentielle. 

Chaque intervention peut prendre une tournure non écrite sur l’ordre de départ. Le chef d’agrès doit être prêt à être surpris : il doit toujours s’efforcer de garder un recul suffisant sur l’intervention, durant les premières minutes mais également tout au long de l’intervention, pour conserver ses capacités de raisonnement. 

Le bilan circonstanciel initial peut être à tout moment contredit par une évolution non attendue de la situation ou de l’état de la victime. Rien n’est figé. 

Se préparer à être surpris

Explorer les circonstances dans le détail

Prendre des décisions, prioriser les actions,

Le recueil initial de ces informations circonstancielles est également important pour le médecin régulateur. Au cours du bilan complet qui suivra, des éléments clés pourront guider son raisonnement diagnostique.

Exemple : une personne présentant des troubles de la vigilance et chez qui l’on retrouve des boites de médicaments vides ou encore une personne qui présente une douleur thoracique à chaque effort.

Ces éléments circonstanciels feront partie intégrante du dossier médical du patient, dissimulés sous le terme « d’anamnèse »

Conclusion

Première étape essentielle pour toute intervention, le bilan circonstanciel demande une analyse globale de la situation afin d’assurer la sécurité et adapter au mieux la réponse opérationnelle. 

Effectuer un bilan circonstanciel rapide et efficace demande des capacités de recul essentielles : le chef d’agrès doit en effet conserver ses capacités de raisonnement que les conditions parfois difficiles d’une intervention pourraient venir altérer. 

Il s’agit d’aller vite, certes, mais sans se précipiter : être convaincu que le temps initial de l’analyse et de la réflexion n’est ni un temps inerte, ni perdu. Il va façonner un raisonnement tactique opérationnel qui doit rester le plus rationnel possible, pour aboutir à une prise de décision adaptée.

La posture de chef impose ensuite de partager l’information avec son équipage pour obtenir une adhésion aux actions demandées et leur priorisation. 

Cette attitude, cette posture, doit être enseignée/transmise à tout personnel pouvant un jour endosser ce rôle de chef d’agrès d’un équipage SUAP. 

S’aider d’une trame type peut aider à rester systématique pour ne rien oublier. Rescue18 vous propose ici un résumé en mode carte mentale, signée Marion Rozac.

Pour aller plus loin…

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