Sainte-Barbe : patronne des sapeurs-pompiers

sainte barbe

Le 4 décembre, dans toutes les casernes de sapeurs-pompiers, de marins-pompiers, de sapeurs-sauveteurs, de pompiers de l’air, etc… Sera fêtée notre sainte patronne ; Barbe d’Héliopolis.

Sainte-Barbe est un personnage mystique dont la légende est répétée à l’occasion de sa célébration, pour rappeler à la corporation pourquoi est-elle devenue la protectrice des sapeurs-pompiers, mais pas seulement. 

On vient chez Sainte-Barbe chercher une bénédiction pour la « malemort » ; tous ces décès n’ayant pu recevoir l’extrême onction, parce que la mort est violente ou survient par le feu.

Sainte-Barbe vient alors au secours des mineurs, des sapeurs du génie, des artificiers, des canonniers, etc… 

Barbe symbolise aussi la force de l’engagement et la ténacité des convictions,  jusqu’à la mort s’il le faut. La devise de la Brigade de sapeurs-pompiers de Paris « Sauver ou Périr » lui fait terriblement écho ! 

Qui est-elle ? Quelle est son histoire ? Pourquoi est-elle la protectrice de notre corporation ? Comment est-elle célébrée chez les pompiers ? Rescue18 vous en dit plus !

Statue de Sainte-Barbe du Corps des sapeurs-pompiers de Saint-Martin-Vésubie (06). Disparue avec le centre de secours lors de la tempête Alex le 2 octobre 2020. (Photo©Laetitia Galais )
  • Statue de Sainte-Barbe du Corps des sapeurs-pompiers de Saint-Martin-Vésubie (06). Disparue avec le centre de secours lors de la tempête Alex le 2 octobre 2020. (Photo©Laetitia Galais )

Fête païenne ou protocolaire ?

Cette journée festive, souvent prétexte à la remise de galons et de décorations, en présence des autorités, se termine bien souvent comme dans les albums d’Astérix par un banquet, voire, par une sympathique soirée dansante. On profite aussi de cet instant pour partager de bons moments avec les familles si souvent sollicitées par l’intérêt collectif qu’impose le secours à la population.

On oublie souvent qu’une cérémonie de remise de médailles s’accompagne d’un protocole, respectueux de la tradition Républicaine qui impose de rendre les honneurs aux récipiendaires. Le repas de Sainte-Barbe se déroule même parfois lors d’une date fantaisiste au milieu de l’année. On peut aussi s’y permettre quelques dérives folkloriques, qui relèvent plus du manque de connaissances que d’un acte délibéré. Les anciens faisaient bien comme ça avant…

Cette euphorie, fait oublier le martyre, et la personne qu’était Barbe. Quel paradoxe pour une corporation si longtemps masculine (du moins jusqu’en 1973) d’être soutenue par la force et le courage d’une icône féminine. Et quelle icône, que notre Sainte-Barbe…

ob 5992ba vive sainte barbe (2)
vive sainte barbe

La légende de Barbe, histoire d’un supplice

Certains situent l’action en Asie mineure, à Nicomédie, qui est aujourd’hui Izmit en Turquie. D’autres à Héliopolis, actuellement Baalbek au Liban, ce qui semble le plus probable, car son père, Dioscore est un édile, une sorte de haut magistrat romain, originaire de Phénicie, actuelle région située approximativement à l’emplacement du Liban aujourd’hui.

Cette région est sous la coupe de l’empire romain, dirigé d’une main de fer par Hercule Maximien (250-310), César Païen, dont les persécutions contre les chrétiens sont à l’époque ordonnées avec zèle.

Barbe, naquit dans cette famille aisée en 270, elle est décrite comme une sublime jeune femme, qui aurait sûrement fait tourner les têtes de nombre de pomplards, collés aux vitres du fourgon, avec l’air aussi intellectuel que le loup de Tex Avery. Seulement, pour notre Betty-Boop d’antan, son Dioscore de papa, avait prévu de la marier avec l’homme qu’il avait choisi. Mais notre amie refusa catégoriquement ce mariage et annonca à son père son intention de se consacrer au Christ.  

Elle fut enfermée alors dans une tour, d’où elle s’échappa, pour être finalement retrouvée après avoir été dénoncée par un berger.

Ni une, ni deux, Dioscore traîna Barbe devant le gouverneur romain de la province qui ne rigola pas, et condamna la malheureuse au supplice. Sa seule façon d’abréger ses souffrances fut d’abjurer sa foi. Barbe s’y refusa, le gouverneur ordonna alors qu’elle soit torturée, décharnée en lui arrachant les seins, on lui brûla certaines parties du corps, et pour finir, son père lui trancha la tête.  

Au moment précis où la lame atteignit le billot, la foudre frappa Dioscore et le tua. Le berger se trouva alors changé en pierre, et ses pauvres moutons en sauterelles.

Son véritable prénom est oublié dans l’Histoire, et ce sont les chrétiens, qui, venant récupérer son enveloppe charnelle, ne pouvant prononcer, ni son prénom chrétien, ni son prénom païen, de peur d’être reconnu, la désignèrent alors comme « la jeune femme Barbare », qui lui donnera le nom de Sainte-Barbara, puis Barbe.

De la légende à la foi

On retrouve ses reliques à Constantinople, après qu’elles furent transférées au VIème siècle par les empereurs Byzantins qui la vénéraient.

Les Vénitiens en apportèrent une partie en Italie et au XIème siècle, la fille de l’empereur Byzantin Alexis Comnène (1081-1118) en transféra une autre partie dans la cathédrale Saint-Vladimir à Kiev, où elles se trouvent encore aujourd’hui.

De nombreux édifices religieux représentent Sainte-Barbe, facilement reconnaissable grâce aux différents attributs qui l’entourent. La tour aux trois fenêtres, représentant la Sainte Trinité est souvent rappelée, comme la fente dans le rocher ou encore la foudre.

Église Santa Barbara dei Librai de Rome

Célébrations chez les sapeurs-pompiers

D’une façon générale, chaque SDIS organise annuellement une cérémonie départementale puis, chaque centre de secours fait de même au niveau local. Dans le sud de la France, en Provence notamment, une messe est souvent célébrée pour honorer les sapeurs-pompiers disparus. Le plus souvent, comme nous l’avons dit plus haut, l’occasion est donnée pour un repas et une petite cérémonie. Cette fête de Sainte-Barbe est souvent organisée par les amicales.

A la Brigade de sapeurs-pompiers de Paris, la Sainte-Barbe débute  par une messe (non obligatoire) donnée par l’Aumônier catholique de l’institution. Ensuite, la journée se vit entre militaires; c’est l’occasion de faire des cocasseries au chef de centre, et d’inverser les rôles dans la bonne humeur et ainsi renforcer l’esprit de Corps, ciment de l’efficience de cette unité. Le sapeur le plus jeune de la garde a d’ailleurs la mission de narrer à ses collègues l’histoire de notre patronne.

A Marseille, le BMPM vient demander la protection de la Bonne Mère, protectrice de la Cité Phocéenne, aux côtés des Marins-Pompiers.

Et ailleurs…

En Allemagne, en Autriche et dans la plupart des pays anglo-saxons, c’est le 4 mai, que l’on célèbre Saint-Florian de Lorch, autre saint patron des pompiers, martyr lui aussi après avoir embrassé la religion chrétienne sous l’empire romain, malgré sa noble mission d’être le chef des pompiers dans la province de Noricum (actuelle Autriche). Le 4 mai est aussi la journée mondiale des sapeurs-pompiers.

Notons toutefois la particularité new-yorkaise où Saint-Patrick, protecteur de la « Grande Pomme », et principale terre d’accueil des colons irlandais qui ont peuplé cet Etat, et également célébré par les « firefighters » du FDNY.

Dans la patrie de Barbe, au Liban, on célèbre aussi le 3 décembre,  la fuite de sa tour. Barbe se fut enfuie grâce à des amis, qui, comme elle, furent déguisés. Les enfants, et non les pompiers, célèbrent la tradition en se déguisant, et en en allant frapper aux portes pour réclamer des gourmandises ou de l’argent.

Procession Sainte-Barbe à Saint-Martin-Vésubie (Photo ©Laetitia Galais)
Procession Sainte-Barbe à Saint-Martin-Vésubie (Photo ©Laetitia Galais)

Dans la nuit du 02 au 03 octobre 2020, la tempête ALEX déverse sa fureur dans les vallées de la Roya et de la Vésubie dans les Alpes Maritimes. Le bilan est très lourd avec 8 morts, 10 personnes disparues et des centaines de maisons emportées par des flots en furie. La caserne de Saint-Martin-Vésubie fait partie des bâtiments avalés par la puissance des éléments.
Le SDIS 06 paye un lourd tribut et pleure la perte de 2 sapeurs-pompiers, Loïc MILLO et Bruno KOHLHUBER.
Depuis 2000, les centres de secours de Roquebillière, Lantosque et Saint-Martin-Vésubie se sont unis pour créer une entente « Unité de la Vésubie ». En 2016, cette entente décide de faire une cérémonie de Sainte-Barbe commune. Cette terrible épreuve a définitivement scellée cette entente, fidèlement à l’esprit de corps entre sapeurs-pompiers.
La Sainte-Barbe est ainsi l’occasion de rappeler la mémoire de leurs disparus et de saluer leur courage lors de ce terrible évènement, au travers d’une messe. 

Messe de St Barbe, Amicale de l'unité de la Vésubie. (©Père Appiano)
Messe de St Barbe, Amicale de l’unité de la Vésubie. (©Père Appiano)

Mascotte ou réelle icône de foi ?

La frontière reste mince en matière de perception entre croyance religieuse, martyr chrétien, et la figure mystique de super héroïne, presque un personnage de Comics.

Le sapeur-pompier, par éthique et également de façon statutaire, est un acteur du secours totalement « laïc ». « Laïc », ne veut d’ailleurs pas dire « athée », mais bien respectant toutes les croyances et toutes les religions. Alors, il n’est d’ailleurs pas rare qu’après un bon flambard qui a chauffé les étiquettes, les « souz » (sous-officiers) et les « cabots » (caporaux) évoquent Sainte-Barbe quand ils sont passés très près de la correctionnelle.

On implore Sainte-Barbe, non pas comme une figure chrétienne, mais plutôt comme un gri-gri mystique, commun à tous, comme notre jargon. Au retour d’un bon « baroud » (intervention), dans les entrailles de la Remise, entre les effluves du « Rif » (feu), quand on nettoie le matériel, noirci de fumée  « On peut remercier Sainte-Barbe d’avoir ramené tout le monde ». Ou encore, lors d’un pot de départ ; « Que Sainte-Barbe veille sur vous »

Barbe est donc devenue une icône rassurante, une sorte de marraine pour ceux qui ne sont pas des grenouilles de bénitiers, ni même des chrétiens, ou une véritable épaule spirituelle pour ceux qui y croient.

Quoiqu’il en soit, et de manière corporatiste, Barbe fait l’unanimité et sa célébration sert de terreau pour rappeler aux plus jeunes l’importance des traditions pour ne pas oublier les épreuves passées et construire avec le groupe la cohésion qui permettra de surmonter celles à venir. 

Partenaires

Retour en haut
Aller au contenu principal