TASSS #2 : situation défavorable pour le sapeur-pompier

Depuis de nombreuses années, la sécurité, qu’elle soit individuelle ou collective, est un enjeu majeur pour chaque sapeur-pompier. Nos méthodes de travail évoluent ainsi en fonction des différents RETEX où les pompiers ont été bloqués ou confrontés à une situation imprévue et particulièrement défavorable. Rescue18 continue la série d’articles sur la sauvegarde opérationnelle.

Généralités

Les différentes interventions varient d’une situation à l’autre et les pompiers interviennent dans des situations évolutives avec de nombreux risques (effondrement, explosion de fumées, embrasement généralisé éclair, flash fire, smoke explosion, …).

Cependant, la maîtrise du système de feu, l’expérience et l’entraînement permettent d’assurer la sécurité du lieu de l’incendie en minimisant le nombre de personnels impliqués, en limitant le temps d’intervention d’un binôme et en analysant régulièrement le risque par tous les acteurs de secours (de l’équipier au chef de site).

Les évolutions d’un incendie, la défaillance de matériel, le malaise d’un sauveteur… engendrent des situations où les intervenants sont exposés à des risques.

Chaque intervenant doit être conscient des dangers encourus, notamment en étudiant la structure bâtimentaire en feu, en effectuant une lecture du feu, en repérant les chemins de repli et de secours et en évitant de se mettre en danger.

« Ne permettez pas que votre vie se transforme en fumée, faites preuve de sécurité afin de maîtriser le feu. »
Cyril Ducoudray

Retour d’expérience

Denver (USA), incendie dans un bâtiment commercial

Le 28 septembre 1992, les pompiers de Denver sont appelés pour un incendie dans un bâtiment à deux étages, comprenant notamment une imprimerie.

Mark Langvardt a été séparé de son partenaire lors de l’intervention et n’a pas pu sortir par les escaliers intérieurs. Retrouvé inconscient dans un couloir de 70 cm de large donnant sur une fenêtre de 40 cm au premier étage de l’immeuble, il fut extrait 55 minutes plus tard par les sauveteurs.

La technique du « DENVER DRILL » a ensuite été créée par les pompiers de Denver pour extraire un sauveteur d’un endroit étroit.

DDF Fire- The Denver Drill

Colombus (USA), incendie de magasin de chaussures

Le 25 juillet 1987, John Nance, du service d’incendie de Colombus, est bloqué au sous-sol du magasin après avoir chuté de 4 mètres en raison d’un trou dans le sol.

À ce moment-là, le feu dans la structure prend de l’ampleur et les conditions thermiques se détériorent rapidement, ce qui rend très compliqué les opérations de sauvetage. Malgré les efforts de ses collègues pour l’extraire du sous-sol, John W. Nance meurt d’asphyxie.

Après cet accident, la technique du « NANCE DRILL » est développée afin d’extraire un pompier conscient ou inconscient depuis un niveau supérieur à travers un trou.

Youtube- ilou224

Montréal (CAN), odeur suspecte sans personne incommodée

Les unités 218 et 614 du service d’incendie de Montréal sont appelées le 21 janvier, vers 3h30, pour une odeur suspecte dans un bâtiment d’habitation R+2.

Après avoir découvert le foyer dans un canapé du salon d’un appartement au RDC, les pompiers ont pris soin de le retirer par la fenêtre, ce qui a provoqué une flamme et incendié les fumées et les gaz accumulés au plafond (Fire Gas Ignition).

Selon le rapport d’enquête, il est spécifié de développer un plan de prévention afin de garantir le respect des directives en vigueur et de le mettre en œuvre pour préserver la santé, garantir la sécurité et l’intégrité des acteurs impliqués. Depuis les pompiers Montréalais s’entraînent à la gestion de l’air, l’auto-sauvetage et le sauvetage de sauveteur.

Roland JC

La Rochelle (FR), feu d’atelier

Les secours de La Rochelle sont appelés dans la nuit du 17 au 18 janvier 2010 pour combattre un incendie d’atelier chez DEM Atlantique, entreprise spécialisée dans le conditionnement de crevettes surgelées.

Au premier étage de l’entreprise, lors de l’attaque, un binôme est confronté à un phénomène thermique semblable à un Fire Gas Ignition (FGI) de type « flash-fire ». Seul l’équipier réussit à s’échapper de ce feu lors du repli. Malheureusement, le chef d’équipe décède.

Après le drame, un sapeur-pompier charentais-maritime se rend en Amérique du Nord pour étudier les méthodes d’auto-sauvetage et de sauvetage de sauveteur. Les méthodes rapportées outre-Atlantique sont adaptées par un groupe de sapeurs-pompiers Rochelais, puis le SDIS 17 valide la formation des techniques d’auto-sauvetage et de sauvetage de sauveteurs.

Sauvetage de sauveteur (TASSS) pour le sapeur-pompier #1

L’évolution dans les SIS

Dès 2004, les mesures de sécurité au sein des SIS ont évolué en adoptant une approche différente grâce au Rapport Pourny, qui a fourni 220 recommandations, dont une vingtaine concernant les accidents thermiques, notamment avec l’introduction des premiers caissons à feu en France.

Aujourd’hui, de nombreux SDIS disposent de caissons à feu ou de Centres d’Observation et d’Étude des Phénomènes Thermiques (COEPT). Il est essentiel d’acquérir une acculturation afin d’analyser et de définir une stratégie pour travailler de manière efficace et sécurisée afin d’améliorer les compétences.

En février 2024, avec la sortie du GTO sauvegarde opérationnelle, les SIS devront développer les formations sur l’auto-sauvetage et le sauvetage de sauveteur afin de renforcer la sécurité lors des opérations. Les modules d’apprentissage sont déjà en cours de développement dans divers SDIS, tels que des passages étroits et des câbles électriques qui obstruent le passage…

En conclusion

En général, les changements dans nos procédures se produisent après un accident où parfois des pompiers décèdent. Il est nécessaire d’apporter une évolution des méthodes et techniques afin de s’entraîner à agir et à réagir face à une situation qui se détériore. La formation de l’équipier au chef de site se concentre sur les aspects physiques, les techniques et la gestion des émotions.

La sécurité en opération doit être une préoccupation commune à tous.