Tout sapeur-pompier, peu importe son ancienneté, a déjà prononcé ou entendu ces sigles au cours d’une garde ou lors d’une manoeuvre.
Le CTA ou Centre de Traitement de l’Alerte et le CODIS ou Centre Opérationnel Départemental d’Incendie et de Secours sont des structures à l’importance primordiale au sein des Services Départementaux d’Incendie et de Secours.
Rescue18 vous propose une série d’articles pour mieux comprendre l’origine des CTA-CODIS, les différentes structures existantes sur notre territoire, leurs missions et les acteurs qui les composent.
Découvrez dans cette dernière partie, les personnels qui arment les salles opérationnelles, à travers les fonctions occupées ainsi que les qualités requises pour assurer ces missions spécifiques, à plus d’un titre. Enfin nous terminerons cet article par la présentation du futur système d’information unifié des Services d’Incendie et de Secours, “NexSIS 18-112“.
Depuis l’arrêté du 13 décembre 2016, il existe de nouvelles appellations des intervenants en CTA-CODIS et leurs rôles, à savoir :
- L’opérateur de salle opérationnelle pouvant assurer deux fonctions: OTAU (Opérateur de Traitement des Appels d’Urgence) et/ou OCO (Opérateur de Coordination Opérationnelle) ;
- Le chef et l’adjoint au chef de salle opérationnelle.
Chef et adjoint de salle opérationnelle
Le chef de salle opérationnelle, assisté le cas échéant d’un adjoint au chef de salle, a pour mission d’assurer la responsabilité et le fonctionnement de la salle opérationnelle durant son activité.
Cette mission se décline en quatre domaines d’activités :
- Gestion de l’activité des opérateurs et des chefs opérateurs de salle opérationnelle, le cas échéant ;
- Gestion des systèmes d’information et de communication des salles opérationnelles ;
- Gestion opérationnelle des moyens ;
- Remontée d’informations.
Le chef de salle opérationnelle exerce son activité sous l’autorité de son responsable hiérarchique direct, selon la nature de la salle :
- Le représentant du DDSIS ;
- Le représentant du commandant de l’unité militaire investie à titre permanent de missions de sécurité civile ;
- Le représentant du chef EMIZ ;
- Le représentant du DGSCGC.
Relations extérieures :
- Requérants, sinistrés, public ;
- Autorités (Mairie, CD, Préfecture, COZ, etc.) ;
- Médias ;
- Services publics et partenaires concernés par les opérations de secours (Gendarmerie Nationale, Police, ENEDIS, GrDF, SAMU, associations agréées de sécurité civile…) ;
- Autres sapeurs-pompiers.
Conditions d’accès à la formation :
- Être lieutenant de sapeur-pompier professionnel. La formation de chef de salle opérationnelle est également ouverte aux sous-officiers occupant un emploi d’adjoint au chef de salle. Pour les unités militaires investies à titre permanent de mission de sécurité civile : être sous-officier ou officier de la filière SIC ou SEC ;
- Être titulaire de la formation d’opérateur en salle opérationnelle, ou avoir suivi le module de compréhension des emplois d’opérateurs et de leurs outils, dont la durée et le contenu sont définis par le service concerné.
Conditions d’exercice :
Emplois de chef de salle opérationnelle et adjoint au chef de salle opérationnelle :
- Remplir les conditions statutaires fixées par les statuts particuliers de sapeur-pompier professionnel et être titulaire de la formation de tronc commun correspondante ;
- Être titulaire de la formation de chef de salle opérationnelle ;
- Suivre les formations de maintien et de perfectionnement des acquis.
Témoignage d’un chef de salle opérationnelle
-“Bonjour et merci de bien vouloir répondre à nos questions dans le cadre de cet article dédié au CTA CODIS.
- Pouvez-vous vous présenter rapidement pour connaitre votre parcours professionnel ?“
-“Je suis le Lieutenant de 1ère classe Maurice BAILLY. J’ai débuté ma carrière à la BSPP où j’ai servi près de 16 ans, de 2002 à 2018. J’ai ensuite réalisé ma reconversion professionnelle vers les SPP, avec le grade de Lieutenant de 2nd classe, en qualité de chef de salle opérationnelle au sein du SDIS de l’Indre durant 3 années. Depuis le 1er mars 2021, je sers en tant qu’officier de centre en charge de la Formation-Sport au sein du CSP Epagny au SDIS de Haute-Savoie.“
- “Comment pourriez-vous décrire votre poste en tant que chef de salle au sein d’un CTA CODIS, en terme de gestion opérationnelle et fonctionnelle ?“
-“Le moins que l’on puisse dire c’est que ce poste est riche !
Sur le plan opérationnel tout d’abord, le chef de salle doit superviser le traitement de l’alerte et le déclenchement des secours. C’est LA raison d’être d’un CTA. Il doit superviser, voire conseiller les OTAU/OCO en cas de difficulté, proposer ou valider une proposition de départ ou de renfort afin que la demande de secours soit honorée à la fois en qualité (engins sélectionnés, compétences des agents, engagement de spécialistes ou de la chaîne hiérarchique) et en quantité (nombre d’engins adapté au motif de départ, anticipation en terme de groupes ou de moyens spécialisés).
Il doit également superviser et coordonner l’activité opérationnelle au niveau du département. En ce sens, il doit sortir du cadre habituel et familier du sapeur-pompier, légitimement habitué à travailler et réfléchir au niveau de son centre de secours et de son secteur d’intervention territorialement compétent. A ce titre, le chef de salle doit donc faire en sorte d’avoir une vue d’ensemble des moyens humains et matériels du SDIS à l’instant « T » afin de maintenir une couverture opérationnelle nominale sur l’ensemble des secteurs du département, notamment par le biais de reconstitutions au profit de secteur dépourvu (dans le cas d’opération importante ou d’indisponibilité prolongée d’engin par exemple) ainsi que d’une lecture attentive des statuts des agrès afin que ces derniers recouvrent un état « disponible » dès que cela est possible.
Sans système informatique, impossible de travailler ! Le chef de salle est donc garant de l’exploitation des outils-métier SIC de la salle CTA-CODIS. En cas de panne, il a la charge de mettre en place les premières mesures palliatives, rendre-compte et déclencher le fonctionnement de la salle en mode dégradé.
Enfin, en relation avec l’officier CODIS, il renseigne le COZ et les autorités de tutelle en cas d’intervention particulière ou importante, notamment par le biais de l’ouverture d’un évènement SYNERGI sur le portail ORSEC ou plus couramment via la rédaction du Bulletin de Renseignement Quotidien (BRQ) qui est un résumé de l’activité opérationnelle des dernières 24 heures.
Du point de vue fonctionnel, le chef de salle veille sur ses opérateurs : il doit faire preuve de bienveillance envers les femmes et hommes placés sous sa responsabilité. La fonction d’OTAU/OCO étant bien souvent éprouvante tant physiquement que moralement, il doit parfois prendre les mesures nécessaires à la bonne gestion physique et émotionnelle de ses personnels et être attentif à tout signe de fatigue, de litige et de perte de sang-froid. La formation des opérateurs étant le gage d’une réponse rapide et adaptée, il veille également à la formation quotidienne des agents (outils-métier, notes opérationnelles…) Pour finir, le chef de salle est l’interlocuteur privilégié des services partenaires (Police, GN, SAMU, ErDF, Mairie, etc.) et doit à ce titre être sensible à la notion de transversalité.“
- “Quel est le souvenir qui vous a le plus marqué durant votre expérience en qualité de chef de salle ?“
-“En réalité, j’en ai deux !
D’abord, le souvenir d’une perte des lignes 18, 17 et 15 sur l’ensemble du département pendant près de 2h. La préfecture, avisée puis justement conseillée par le chef du Groupement Opération, a alors diffusé un message d’alerte sur son site internet et ceux des services publics, invitant notamment la population à transmettre les demandes de secours via les réseaux sociaux du SDIS (Twitter, Facebook…). Le CTA a ainsi pu honorer quelques demandes de secours via ce relais. Outre les autres mesures palliatives mises en place et qui ont permis de répondre à cette panne, cette action est un bel exemple d’utilité des Médias Sociaux en Gestion d’Urgence ! (MSGU)
Plus personnellement enfin, j’ai eu l’opportunité de guider par téléphone une mère, seule à son domicile face à son nourrisson en arrêt cardio-respiratoire (ACR). Il a fallu canaliser sa détresse, à distance la guider dans les gestes à réaliser et surtout l’encourager à poursuivre la réanimation minutes après minutes. Entendre le bébé recouvrer conscience et pleurer peu avant l’arrivée des intervenants a été un moment de soulagement et d’émotion. On ne le dira jamais assez : les agents du CTA-CODIS sont les premiers maillons de la chaîne des secours et ils peuvent eux aussi accomplir des actes méritoires au sein de la salle opérationnelle. Il est à mon sens très important de valoriser le travail qu’ils réalisent au quotidien « dans l’ombre ».“
- “Enfin, quelles sont, selon vous, les qualités requises pour occuper ces fonctions et qu’est-ce que cette expérience vous a apporté personnellement et professionnellement ?“
-“Quid de l’expérience perso et pro ?
Le chef de salle opérationnelle partage les mêmes qualités de base de tout sapeur-pompier : réactivité, sang-froid et adaptabilité. Il doit néanmoins au vu des particularités de son poste et de ses fonctions, savoir en développer d’autres ! Notamment l’esprit de synthèse, d’analyse opérationnelle et d’anticipation.
En ce qui me concerne, ce poste m’aura permis d’élargir ma vision opérationnelle d’un SDIS, de comprendre les contraintes d’un CTA-CODIS et les exigences qui en découlent vis-à-vis des intervenants, notamment en termes de remontées d’informations. A cet égard, mon œil de COS et mes messages de renseignements ont ainsi gagné, je pense, en pertinence.
D’un point de vue personnel, j’ai développé au cours de ces 3 années mon sens du contact humain et de l’interservices, Je mets d’ailleurs un point d’honneur aujourd’hui en tant qu’officier formation au sein de mon CSP, à développer les échanges entre sapeurs-pompiers et services partenaires lors de manœuvres ou de rencontres.“
- “Voulez-vous ajouter quelque chose à propos de ce poste et de ses fonctions particulières ?“
-“J’ai toujours été convaincu que le métier de sapeur-pompier est un métier d’expérience.
On ne se réalise pas en restant dans sa zone de confort. Il faut multiplier les affectations et les expériences professionnelles, qui font la richesse d’une carrière ! Fort de ce constat, je ne peux qu’encourager tout sapeur-pompier à effectuer un passage en CTA-CODIS. Le lieu et le poste peuvent paraître à première vue, obscurs et à raison, éloignés du terrain et de la vie de caserne, mais chacun en retirera à l’issue de son passage une réelle plus-value tant sur le plan professionnel que personnel.“
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“Merci pour votre disponibilité et votre implication dans cet interview, qui j’en suis sûr permettra d’avoir un éclairage plus précis sur le rôle de chef de salle opérationnelle et ses fonctions dédiées.“
Opérateur de Traitement des Appels d’Urgence – Opérateur de Coordination opérationnelle
Le statut des OTAU et des OCO au sein des SDIS a évolué compte tenu du fait que ces fonctions constituent un emploi opérationnel répondant logiquement au statut de sapeur-pompier selon le décret n°90-850 du 25 septembre 1990, impliquant la tenue de ces fonctions par des sapeurs-pompiers.
Hiérarchie :
L’opérateur de salle opérationnelle assure sa mission sous l’autorité d’un chef de salle et/ou d’un adjoint au chef de salle.
Relations extérieures :
- Requérants ;
- Services publics ou privés ;
- Sapeurs-pompiers ;
- Moyens nationaux.
Qualités requises :
Qualité d’écoute et relationnelle, maîtrise de soi, réactivité, autonomie, aptitude à travailler en équipe.
Conditions d’accès à la formation :
Être sapeur-pompier ou sapeur-sauveteur du grade de sapeur 2ème ou 1ère classe, titulaire de la formation d’intégration/initiale de sapeur-pompier ou de l’attestation de fin de formation initiale sécurité civile (AFFISC) pour les FORMISC.
Missions :
L’opérateur de salle opérationnelle a pour mission de traiter en temps réel tous les appels d’urgence et/ou d’assurer le suivi opérationnel et administratif des opérations.
Il est affecté dans un centre de traitement des appels d’urgence et/ou dans un organe de commandement (centre opérationnel) de niveau départemental, zonal ou national.
Cette mission se décline en deux domaines d’activités :
- Traitement des appels d’urgence ;
- Coordination opérationnelle.
Toutefois, suivant l’organisation du centre opérationnel, l’opérateur de salle opérationnelle peut assurer deux fonctions distinctes :
- Opérateur de Traitement des Appels d’Urgence : OTAU ;
- Opérateur de Coordination Opérationnelle : OCO.
Il est néanmoins recommandé de former les opérateurs aux deux fonctions.
L’activité d’accueil et d’orientation des appels peut, par ailleurs, être distincte des deux fonctions précitées.
La formation correspondante s’appuie sur la formation d’opérateur de traitement des appels d’urgence.
Les modalités d’organisation de la formation (durée, contenu, évaluation) sont définies par l’autorité compétente responsable de la structure concernée.
Conditions d’exercice :
Activité d’opérateur de salle opérationnelle :
- Être titulaire de la formation d’intégration / initiale d’équipier de sapeur-pompier ou de l’attestation de fin de formation initiale sécurité civile (AFFISC) pour les FORMISC ;
- Être titulaire de la formation d’opérateur en salle opérationnelle correspondante à l’activité exercée ;
- Suivre les formations de maintien et de perfectionnement des acquis.
Activité de chef opérateur :
- Être caporal de sapeur-pompier, titulaire de la formation de chef d’équipe ou de la formation équivalente pour les unités militaires investies à titre permanent de missions de sécurité civile ;
- Être titulaire de la formation d’opérateur en salle opérationnelle ;
- Suivre les formations de maintien et de perfectionnement des acquis.
Opérateur de Traitement des Appels d’Urgence
Missions :
Réceptionner et traiter les appels reçus quelle qu’en soit la nature :
- Écouter la requête de l’appelant ;
- Identifier le requérant et localiser l’intervention ;
- Diriger l’entretien : questionner, canaliser, calmer, accompagner, rassurer l’appelant ;
- Déterminer le motif de l’appel ;
- Apporter une réponse immédiate au requérant en le renseignant, en le conseillant ou en l’avisant de la prise en compte de son appel ;
- Retranscrire, simultanément au traitement de l’appel, et classifier les informations recueillies suivant le protocole défini ;
- Orienter l’appel vers les services compétents, le cas échéant, en s’assurant de la prise en compte de l’appel ;
- Traiter les appels non urgents (différés ou multiples).
Évaluer le degré d’urgence de l’appel reçu :
- Identifier une détresse ou des circonstances particulières entraînant un départ immédiat selon les règles d’engagement définies ;
- Reformuler les informations ou la requête exprimée par le requérant ;
- Délimiter avec précision et pertinence la nature de la demande ;
- Collecter les informations nécessaires au traitement de l’appel et utiles au déroulement de l’intervention, le cas échéant ;
- Évaluer le degré d’urgence ;
- Retranscrire, simultanément au traitement de l’appel, et classifier les informations recueillies suivant le protocole défini.
Élaborer une réponse opérationnelle pertinente, adaptée à l’urgence :
- Décider de l’engagement des moyens au regard des informations collectées ;
- Qualifier l’intervention en respectant les protocoles définis ;
- Apprécier la nature des réponses opérationnelles possibles et les moyens mobilisables ;
- Évaluer et adapter les moyens humains et matériels disponibles à engager sur l’intervention au regard des informations recueillies ;
- Solliciter, suivant la nature de l’appel, les services partenaires ;
- Solliciter, si besoin, l’avis et rendre compte à son supérieur hiérarchique ;
- S’assurer de la réception de l’alerte par l’OCO (si fonction OTAU/OCO distincte et suivant l’organisation de la structure).
Contribuer à l’efficience du système d’information et de communication :
- Mettre en œuvre les modes dégradés ;
- Signaler tout dysfonctionnement des systèmes d’information et de communication au chef de salle ou selon les consignes établies ;
- Participer à la mise à jour de la documentation ou des données opérationnelles nécessaires à l’activité du service ;
- Participer à la maintenance de premier niveau.
Déclencher les moyens de secours :
- Vérifier la cohérence et l’adéquation entre les moyens proposés et la nature du sinistre ;
- Vérifier la cohérence géographique et la disponibilité des moyens engagés sur le lieu du sinistre (provenance des engins, couverture opérationnelle) ;
- S’assurer de la transmission de l’alerte vers les centres d’incendie et de secours et de sa prise en compte ;
- S’assurer de la réception des informations par la chaîne de commandement et par les services extérieurs engagés sur l’intervention ;
- Solliciter, si besoin, l’avis et rendre compte à son supérieur hiérarchique ;
- Traiter les interventions mises en différé ou à caractère multiple.
Opérateur de Coordination Opérationnelle
Missions :
Gérer et coordonner les moyens de secours engagés sur l’intervention :
- Recevoir et traiter les données relatives aux opérations venant de l’OTAU (si fonction OTAU/OCO distincte et suivant l’organisation de la structure) ;
- S’assurer du départ des moyens opérationnels ;
- S’assurer de l’arrivée des moyens sur le lieu de l’intervention ;
- Veiller, réceptionner et exploiter les messages de remontée d’information émanant des moyens engagés et en assurer la retransmission conformément aux protocoles définis ;
- Assurer l’interface entre le commandant des opérations de secours, les moyens en transit, les autorités et les services extérieurs durant l’intervention ;
- Envoyer les renforts opérationnels demandés par le commandant des opérations de secours ;
- Exploiter la documentation opérationnelle (plans de secours…) ;
- Transmettre le cas échéant toutes informations complémentaires au commandant des opérations de secours ou aux moyens en transit ;
- Rendre compte au chef de salle de toutes situations opérationnelles particulières.
Gérer la fin de l’intervention et son suivi administratif :
- S’assurer, en retour d’intervention, de la disponibilité ou non des moyens humains et matériels ;
- Assurer la traçabilité des informations, actions, décisions liées à l’intervention ;
- Consigner et transmettre les besoins de mise à jour des données opérationnelles ;
- Signaler tout dysfonctionnement des systèmes d’information et de communication au chef de salle.
Témoignage d’un OTAU/OCO :
“En poste entre janvier 2018 et mars 2021 au sein du CTA CODIS du Sdis 36, ma réflexion, sur ces fonctions, a largement évolué. En effet, j’ai désormais pleinement conscience de la plus-value apportée par ces fonctions et de l’importance primordiale, notamment au niveau opérationnel, de l’OTAU OCO.
Les fonctions d’opérateur sont trop souvent méconnues et mésestimées par le reste du personnel des SDIS et par moi le premier puisque j’ai refusé de postuler à ce poste il y a plus de 7 ans sous prétexte de ne pas être prêt à quitter “l’opérationnel“.
Comme je l’évoquais précédemment, ce poste et ses fonctions apportent une énorme plus-value au niveau opérationnel, de par une compréhension approfondie du fonctionnement et de la gestion opérationnelle, ainsi qu’une connaissance renforcée des contraintes géographiques, structurelles, fonctionnelles ou autres du département et du Sdis.
Les informations transmises par l’opérateur aux sapeurs-pompiers intervenants, via le “ticket de départ“, sont primordiales car elles vont permettre à l’équipage engagé de se préparer et de se projeter dans la gestion opérationnelle de l’intervention. A ce titre, ces informations doivent être le plus précis et concis possible, que ce soit en terme de localisation que de précisions quant au motif ou détails concernant l’intervention.
Durant mon affectation au CTA CODIS, j’ai été à plusieurs reprises en ligne avec des requérants, témoins de victimes en détresse vitale, notamment en arrêt cardio-respiratoire (ACR).
La principale difficulté lorsque l’on prend en charge ce type d’appels, est de faire preuve de suffisamment de pédagogie et d’empathie pour rassurer puis guider la/le requérant(e) pour réaliser les gestes de premiers secours. Faire se concentrer la/le requérant(e) sur un geste technique permet parfois de dépasser le stress psychologique causé par la situation et ainsi de consentir à la pratique de ces gestes de premiers secours, la réanimation cardio-pulmonaire (RCP) par exemple.
Car comme évoqué dans cet article SUAP, les premières minutes sont primordiales dans la prise en charge de l’ACR, afin de réduire au minimum le “no flow“ et ainsi donner le maximum de chance de survie à la victime.
Le dernier “Guide de Techniques Opérationnelles Sauvetages et mises en sécurité“ formalise cette pratique empirique jusqu’à présent, au sein de la majorité des CTA, avec le guidage des gestes de premiers secours par l’OTAU.
Mon passage au sein du CTA CODIS m’a également permis de réfléchir sur la prise en compte de contraintes physiologiques et cognitives du poste d’OTAU OCO avec la rédaction d’un document à destination des personnels affectés et de ma hiérarchie.
Je ressors de cette affectation, enrichi, fort de beaucoup d’expérience et d’une connaissance approfondie de la gestion des appels de secours ainsi que du fonctionnement structurel et opérationnel de mon Sdis. Ceci apportant nécessairement un plus au profit de mon activité opérationnelle sur le terrain. Je conseille donc à tout sapeur-pompier de passer par une affectation en CTA CODIS au cours de sa carrière.
Je finis en insistant sur la nécessité pour toutes et tous, de se former aux gestes de premiers secours afin de pouvoir être acteur(rice) de la résilience de notre population face à ce type d’intervention dans le cadre de sa vie privée ou professionnelle.“
NexSIS 18-112. Système d’information unifié des Services d’Incendie et de Secours
« Nexsis 18-112« , un système de gestion des alertes plus performant et résilient pour les sapeurs-pompiers.
À la suite des attentats de novembre 2015 et du débordement des centres de traitement de l’alerte, saturés par le nombre d’appels d’urgence, l’État et les collectivités territoriales ont lancé le projet d’un nouveau système de réception des alertes et de commandement des opérations, appelé « NexSIS 18-112 ».
Ce projet a fait l’objet d’un rapport présenté par le sénateur Jean-Pierre Vogel devant la commission des finances le mercredi 2 juin dernier. Dans ce rapport, le sénateur, qui suit depuis 2014 le budget de la sécurité civile, livre ses analyses sur le contexte de la mise en œuvre du projet, son financement et son avancée. Ses travaux lui ont permis de constater que “NexSIS 18-112“ est un système innovant, qui doit être utilisé par tous les services départementaux d’incendie et de secours (SDIS) dans le but d’améliorer la prise en charge des secours et d’accélérer les échanges entre les différents intervenants. En effet, aujourd’hui, chaque SDIS dispose de sa propre technologie, qui n’est que peu interconnectée, entre les SDIS eux‑mêmes, avec les forces de police et de gendarmerie, ou avec le Ministère de l’Intérieur. Ces technologies sont en outre marginalement interopérables avec celles des SAMU.
“NexSIS 18-112“ doit donc permettre une interopérabilité entre les systèmes de l’ensemble de la chaîne de secours, tout en garantissant une meilleure résilience qui s’appuiera sur un réseau commun de collecte des appels. Ainsi, les conséquences d’une panne de réseau comme celle intervenue ce mercredi 2 juin 2021 pourraient être surmontées plus aisément, comme le souligne le sénateur Vogel : » “NexSIS“ permettra à un SDIS d’un département A de récupérer et traiter directement les appels initialement acheminés vers le SDIS d’un département B, qui aurait subi une panne de réseau ou une surcharge d’appels« . De plus, avec ce nouveau système, les sapeurs-pompiers pourront prendre en charge tous types d’alertes au-delà des seuls appels téléphoniques, en intégrant les flux de données dans son système (SMS, courriels, réseaux sociaux, objets connectés…)
Outre ces intérêts sur le plan opérationnel, “NexSIS“ apportera également d’importants gains financiers, puisque le coût du projet est estimé à 237 millions d’euros sur 10 ans, « alors que les technologies actuelles ont coûté près de 600 millions à l’ensemble des SDIS sur la même durée », poursuit le sénateur. « Ces perspectives sont certes encourageantes, mais doivent être garanties » pour le sénateur, qui formule à cet égard plusieurs recommandations. Il souhaite notamment que soient confortés les moyens de l’Agence du numérique de la sécurité civile (ANSC), récemment créée pour développer “NexSIS 18-112“, et que cette dernière appuie ses démarches pour garantir une transition sans régression vers le nouveau système.
À ce jour, “NexSIS“ est déjà utilisé par le SDIS de la Seine-et-Marne dans une « version de secours », et sera livré dans près de la moitié du territoire d’ici fin 2023. Toute l’Île‑de‑France en sera équipée à cette date, notamment pour renforcer le dispositif de sécurité de grands événements comme les Jeux olympiques de Paris 2024.
Extrait du discours d’Emmanuel Macron, Président de la République lors du CNSPF 2021 de Marseille:
« Le second sujet, qui est depuis longtemps au cour de vos discussions avec l’Etat : c’est le fameux numéro unique d’urgence.
Ce sujet, je crois que je n’ai pas besoin de le recontextualiser, vous l’avez assez bien fait, y compris avec des formules assez imagées, cher Président.
La question est ancienne : faut-il regrouper tous les numéros d’urgence pour davantage d’efficacité comme beaucoup de nos voisins ? Si oui, comment l’organiser ?
J’ai écouté chacun avec beaucoup de respect et je le dis aussi parce que notre volonté est d’avoir une France unie, d’avoir des sapeurs-pompiers, des soignants, des urgentistes qui travaillent main dans la main pour l’efficacité de nos territoires. Et notre seul objectif est l’amélioration de la prise en charge des victimes.
Ensemble. « Rouges » et « Blancs », si vous m’autorisez cette formule. Pour trancher les débats qui durent depuis des années autour de la bonne organisation, et je le dis parce qu’on sait les désaccords et j’ai beaucoup de respect pour toutes celles et ceux qui, avec la même foi, le même engagement, portent ces messages. Je crois que la loi permet une avancée majeure en ce qu’elle permet d’avancer sur le chemin du pragmatisme, c’est-à-dire utiliser cette voie qui a fait l’unanimité, celle de l’expérimentation.
Concrètement, seront mises en place dans une zone de défense – en quelque sorte une grande région qui correspond au commandement ainsi défini dès l’année prochaine trois types de plateformes regroupant selon diverses modalités numéro d’urgence et permanence des soins.
Temps de réponse, qualité d’accompagnement des usagers, prises en charge des victimes, prise d’un premier appel au titre du dé-bruitage et bascule vers une plateforme d’envoi des moyens : nous évaluerons méthodiquement au bout de deux ans quelle est la solution la plus efficace.
Et donc, ce texte correspond totalement – et c’est le fruit de votre travail, donc je le complimente aisément parce que ça n’est pas le mien – mais il correspond à ce que je porte et ce en quoi je crois.
C’est-à-dire dans notre pays qui adore les débats théoriques et les confrontations de principes, essayer d’utiliser le chemin du pragmatisme et de l’évaluation et de se dire on va regarder toutes les options et nous allons mesurer laquelle est la plus efficace. Et peut-être d’ailleurs que nous inventerons collectivement une solution à laquelle nous n’avions pas initialement pensé, mais qui sera le fruit des pratiques de cette expérimentation.
Ce que je vous décris là est le fruit de votre travail, c’est écrit noir sur blanc dans la loi, ce sera donc mis en œuvre dès le début de l’année qui vient.
Il est temps, dans l’intérêt des victimes et de nos compatriotes, d’aller de l’avant. »
Photo d’illustration
Crédit photo : www.yvelines-infos.fr