La compréhension et l’étude de la mécanique du feu sont parmi les premières formations que le sapeur-pompier reçoit lors de son instruction. Pour autant, ces connaissances nécessitent une remise à jour régulière car cette science est évolutive et permet ainsi aux Soldats du Feu de mieux appréhender leur plus fidèle ennemi.
RESCUE18 va donc s’attacher à vous proposer plusieurs articles en la matière et de façon progressive ; qu’ils soient basiques ou bien techniques…
NDLR : cet article traite de la fonction de Chef d’Agrès Tout Engin (CATE) et plus particulièrement du rôle du chef d’agrès Incendie (INC) quelque soit l’engin-pompe en service dans son centre de secours. Le but est d’apporter une synthèse, du Retex et des « bonnes pratiques ». L’article ne se substitue en aucun cas aux GDO/GTO traitant du rôle du COS et/ou du chef d’agrès INC, ou au Règlement Opérationnel (RO) de son SDIS d’appartenance.
Généralités
Le COS, qui peut être le premier chef d’agrès INC, est un acteur central de l’intervention. Il est garant des mesures immédiates de sauvegardes, du respect de toutes les étapes de la MGO, des moyens à demander et de la sécurité de ses personnels sur intervention. A ce titre, il doit posséder une connaissance parfaite des règlements, excluant ainsi l’approximation et l’improvisation.
La conduite d’une opération de secours repose sur les cinq piliers présentés dans ce guide, qui reste une des références dans le domaine du commandement :
- la doctrine : un socle commun de principes qui permet à une équipe sous l’autorité d’un chef de poursuivre le même but ;
- le temps : un facteur qui peut avoir une place importante pour le COS dans le cadre de la résolution de la situation opérationnelle ;
- l’espace : ou l’étude de la zone d’intervention (ZI) proprement dite ;
- le commandement : ou plutôt l’art de commander. Du comportement du chef tiendra beaucoup la réussite de l’opération ;
- la discipline : intimement liée au pilier précédent, elle est déterminante pour la conduite des actions de manière ordonnée et sécurisée.
Les interventions quotidiennes permettent d’acquérir de l’expérience, et de faire face progressivement à des situations de plus en plus complexes. Cette complexité qui nécessite parfois le recours à des niveaux de commandement élevés, impose à celui qui va devenir COS des qualités intrinsèques particulières.
« Un chef est celui qui est en capacité de rester calme en pleine tempête »
(extrait du GDO)
AVANT – PENDANT – APRES
Cet article traitera du rôle du chef d’agrès incendie en trois temps :
- la préparation (avant)
- la réalisation (pendant)
- le reconditionnement (après)
Ces trois phases sont indissociables pour réaliser sa mission dans les meilleures conditions possibles. Le principe de l’amélioration continue est utilisé chez les sapeurs-pompiers, ce qui permet une remise en question constante.
AVANT
La phase de préparation
Être sapeur-pompier ne s’improvise pas ! Il est donc nécessaire de se former, de se préparer et de se mettre à jour continuellement pour être irréprochable le moment venu car nous avons des vies entre nos mains, aussi il ne faut pas prendre à la légère notre mission. Enfin, la réflexion du schéma opérationnel mis en place par le COS concoure à la bonne exécution et à la réussite de la mission.
La connaissance du métier
En complément de ses différentes formations et de son expérience acquise, un CATE doit veiller à maintenir et à adapter ses compétences face aux évolutions opérationnelles réglementaires, ses missions et ses activités. Le CATE est un cadre responsable de deux équipes (parfois plus), il doit s’attacher à assurer un climat de confiance sur intervention afin d’obtenir le meilleur rendement de ses personnels.
Son rôle s’étend également à une fonction d’encadrement de la garde en caserne en qualité de Sous-Officier de Garde (SOG). Son comportement se doit donc d’être exemplaire.
Cette préparation passe ainsi par une participation aux différentes actions de formation ainsi qu’à l’analyse et au partage de pratiques (RETEX/PIO) après les interventions ou exercices. Il doit posséder également une connaissance accrue des risques et des particularités de son secteur ; ceci est une forme d’anticipation qui permettra un meilleur engagement des secours. Enfin, cela passe également par des actions personnelles telles que des lectures et des mises en œuvre de matériels.
Ne l’oubliez pas, chaque sapeur-pompier est l’acteur premier du développement de ses compétences.
La préparation physique
La préparation physique est indispensable pour exécuter ses missions. Chaque sapeur-pompier a un rôle primordial en matière de santé-sécurité. Cette préparation physique consiste à :
- avoir un rythme de vie adapté
- maintenir sa condition physique et optimiser son potentiel
- avoir une bonne hygiène de vie
- être réglementairement à jour de sa visite médicale d’aptitude
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La préparation mentale
Les opérations de lutte contre l’incendie par leur cinétique rapide et leurs effets importants qu’elles génèrent, mettent l’intervenant en situation de stress opérationnel. La préparation des personnels doit le prendre en compte.
« Le métier de pompier vous projette dans des situations extrêmes. Prenez connaissance de vos propres capacités. Entreprenez des actions vertueuses pour vous prémunir des éventuelles conséquences de votre activité opérationnelle.
Le sapeur-pompier s’entretient physiquement, s’entraîne et se perfectionne techniquement, mais qu’en est-il de ses capacités mentales ? Peut-il entraîner son cerveau comme il le fait avec son corps et ses habiletés techniques ?
La Préparation mentale opérationnelle peut être définie comme un ensemble de principes et de techniques visant à découvrir son potentiel, augmenter ses capacités et se prémunir du stress quotidien, latent et opérationnel. Découvrez à travers cet ouvrage les différents éléments vous permettant de comprendre les fonctionnements empiriques du cerveau, l’influence des émotions et les incidences liées à la fatigue et au stress. »
La préparation mentale opérationnelle de Thierry Guilbert
PENDANT
La réalisation de la mission
» Le chef d’agrès dirige un agrès composé d’une ou de plusieurs équipes. Il peut commander une opération de secours nécessitant jusqu’à l’engagement d’un agrès en plus du sien et/ou jusqu’à l’arrivée de l’échelon supérieur. Il peut être l’adjoint d’un chef de groupe. C’est généralement le premier COS d’une opération. «
GDO/GTO
Le chef d’agrès incendie doit optimiser son engin et ses binômes. Cela impose des prises de décisions, des choix, des priorisations…
Quelques éléments de réflexion :
- optimiser l’emploi de la pompe de son engin par un stationnement judicieux et un choix de PEI adapté (débit, distance, etc…) Voir article sur le placement des engins.
- optimiser son engin, et donc ses binômes, en considérant qu’avec ses deux équipes il pourra simultanément procéder aux sauvetages et attaquer le sinistre. En effet, l’établissement d’un ou plusieurs moyen(s) hydraulique(s) et l’arrivée rapide de l’eau permet d’attaquer le feu/foyer ; cette action aura pour conséquence directe de faciliter les sauvetages et de « calmer » les esprits en rassurant les éventuelles personnes piégées. Ceci est valable pour une intervention en présence de sauvetages et/ou mises en sécurité.
- en l’absence de victimes, il optimisera ses personnels par la recherche de plusieurs points d’attaque afin de lutter contre les propagations, attaquer le foyer, faire la part du feu et ainsi rechercher l’efficience en limitant les dégâts. Outre la sécurité sur intervention, le concept de la « part et de la valeur du sauvé » doit guider sa réflexion.
La sécurité en intervention
La sécurité en intervention est l’ensemble des mesures prises visant à :
- identifier les dangers auxquels sont soumis les intervenants
- figer, diminuer et supprimer les risques
- adapter les règles de protection collective ou individuelle
Cependant la sécurité sur intervention reste l’affaire de tous ! Ainsi, les sapeurs-pompiers engagés sur une opération doivent :
- respecter les ordres reçus
- agir avec calme et en silence
- rester serein
- rendre compte
Le chef d’agrès incendie participe à la compréhension de la situation opérationnelle en analysant régulièrement les indicateurs dont il dispose, pour s’adapter en temps réel et mettre en œuvre les mesures nécessaires telles que :
- les réactions immédiates
- la lecture du feu et des fumées
- le port approprié des EPI (voir article)
- le contrôle mutuel des équipements de protection (voir Article ARI)
- le strict respect des consignes de sécurité
- la maîtrise des méthodes et techniques de lutte et de protection
- la mise en place d’itinéraires de replis et de secours
- la communication avec ses subordonnés directs ou d’autres C/A
Le chef d’agrès incendie est chargé en permanence d’évaluer et de surveiller l’engagement de ses personnels. Il doit prendre en compte également les autres services engagés sur opération.
Barrer le gaz est l’une de ses priorités !
Le zonage de sécurité est sous la responsabilité du COS. Lui seul décide des emplacements, des limites et des dénominations des secteurs.
La MGO : Marche Générale des Opérations (INC)
La MGO, Marche Générale des Opérations sera traitée plus tard dans un article dédié. Elle est ici résumée de façon succincte et centrée sur le rôle du chef d’agrès en intervention. Nous n’aborderons par conséquent qu’une partie de l’ensemble de ses actions.
Le placement des engins
Ce sujet a déjà été traité dans la partie 3 de la série d’articles Feu proposée par Rescue18. Vous pouvez consulter l’article ci-dessous.
Les réactions immédiates
Les réactions immédiates sont les actions que le COS doit entreprendre dès son arrivée sur les lieux. Elles précèdent le raisonnement tactique et peuvent être du domaine :
- de l’action, dont les sauvetages et mises en sécurité
- du renseignement
- de l’information
Les reconnaissances
Les reconnaissances ont pour objet de collecter les informations relatives à l’analyse de la zone d’intervention, au sinistre, aux personnes et biens menacés en tenant compte de l’ensemble des axes de propagations potentiels.
Quelques exemples de questions – donc non exhaustif – que doit se poser (ou poser) le C/A incendie lors de sa recherche des renseignements qui concourent à sa reconnaissance :
- que se passe t-il ?
- quel type de feu façe à lui (pavillon, immeuble, ERP, industrie, etc…) ?
- nature et exploitation du bâtiment ?
- présence de sauvetages et/ou victimes ?
- nombre d’étages (superstructure et infrastructure) ?
- où le sinistre se situe t-il ?
- quels sont les risques de propagation(s) ?
- quels sont les accès (en rechercher deux à minima si possible) ?
- présence de fluides (gaz, électricité, cuve de fioul…) et où se situent les organes de barrage ?
- quels sont les moyens à demeure à sa disposition (colonne sèche ou humide, SSI, RIA, tirez-lachez, etc…) ?
A l’arrivée sur les lieux, le C/A doit effectuer une lecture batimentaire. Pour cela, il peut se placer sur le trottoir en face du bâtiment sinistré. Cette lecture lui permettra :
- de confirmer le nombre d’étages
- de déduire les moyens de prévention à demeure en fonction du bâtiment impacté. Habitation, IGH, ERP, industrie, bâtiment ancien ou moderne, etc… Il doit donc faire appel à ses connaissances
- d’observer les fumées, flammes, risque(s) de propagation(s)
- d’attribuer aux différentes façades, points particuliers, etc… une lettre ou un nom de baptême pour les futurs secteurs fonctionnels et/ou géographiques du COS
Le C/A incendie peut utiliser plusieurs moyens mnémotechniques pour ne rien oublier lors de sa reconnaissance. Par exemple, lors d’un feu d’habitation il peut appliquer le « CAGETE » :
- Courette > permet de reconnaître la façade arrière, observer les risques de propagations ou si une fenêtre est « allumée », de confirmer ou non la présence de sauvetages et/ou victimes.
- Ascenseur > doit être ramené au niveau 0/RDC puis bloqué. Permet de s’assurer de l’absence de personnes piegées à l’intérieur et de maîtriser la gaine qu’il représente. En cas de blocage à un autre niveau que celui accessible où se trouvent les secours, le C/A devra confier la mission de reconnaissance à un binôme. Il ne faut pas exclure la présence de victimes à l’intérieur comme l’ont prouvés différents Retex.
- Gaz > à barrer au niveau du palier ou en façade pour un feu plus dimensionnant, ou sous-trottoir pour les feux de sous-sols et infrastructures puisque les conduites de gaz (jaunes) passent généralement sous le bâtiment.
- Electricité > s’il est possible de couper rapidement l’électricité dans un appartement grâce au compteur situé généralement à l’entrée, il faut garder à l’esprit que les parties communes ne seront pas mises hors tension tant que l’agent ENEDIS n’est pas présent.
- Tirez-lachez > dispositif préventif qui permet d’actionner l’exutoire d’évacuation des fumées dans une cage d’escalier. Le fait d’évacuer les fumées doit être une priorité pour le C/A car cela limitera/evitera les risques de propagations et surtout modifiera l’ambiance de son intervention. Un « bouchon de fumées » en haut d’une cage d’escalier est une problématique qui va impacter les habitants et la structure quand bien même le volume initial sinistré serait de petite taille.
- Exutoire > après avoir actionné un tirez-lachez, il faut s’assurer de son efficacité. Si le bâtiment sinistré en est dépourvu, il sera donc nécessaire de procéder à la création d’un exutoire autrement.
Ces informations permettront au C/A de déterminer le volume des moyens à demander, les objectifs, les moyens à mettre en oeuvre, les priorités et son idée de manœuvre. Le chef d’âgrès incendie, après avoir réalisé son premier tour du feu (et son CAGETE) doit se rendre au niveau du feu afin d’observer et d’analyser de lui même. Ainsi, il aura acquis une vision assez globale qui lui permettra d’utiliser un ordre initial et des ordres de conduite. Ils sont formalisés grâce au moyen mnémotechnique suivant :
Le C/A incendie doit procéder à une reconnaissance cubique (6 faces) :
- reconnaissances des faces extérieures
- reconnaissances étages + toit
- reconnaissances sous-sol
- ne pas omettre la courette intérieure ou les puits de lumière
Il faut privilégier :
- les communications existantes (simples et sécurisées)
- les moyens élévateurs aériens
- les échelles à mains
- en dernier recours des moyens type LSPCC
Lors d’opérations en bâtiment avec étages, les reconnaissances s’effectuent généralement dans l’ordre suivant :
- dans un premier temps l’étage du foyer dans son intégralité
- dans un deuxième temps l’étage directement au-dessus du sinistre est reconnu, suivi ensuite du dernier étage du bâtiment. Ces niveaux présentent un danger croissant conditionné par le développement de l’incendie et l’accumulation des fumées. Le binôme chargé de reconnaître le dernier niveau devra créer l’exutoire ou s’assurer de son efficacité
- les étages intermédiaires et inférieurs sont reconnus par la suite
Le niveau du feu s’appelle le plan neutre. Le C/A doit conserver à l’esprit que ce niveau et les niveaux supérieurs constituent une zone de risque(s) en l’absence d’un moyen hydraulique.
La phase comprise entre la présentation des secours et l’établissement d’un moyen hydraulique est appelée temps de vulnérabilité.
Idée methodologie :
- faire un trait au moment de l’entrée dans le volume (reconnaissances en cours)
- puis compléter par un deuxième trait au moment de la sortie pour former une croix (reconnaissances effectuées)
- un cercle autour de cette croix peut compléter ce code, signifiant qu’une seconde reconnaissance a été effectuée dans ce local
Rappel > découverte de victime :
En cas de découverte d’une victime, son sauvetage ou sa mise en sécurité peut être facilité grâce à l’emploi de la cagoule d’évacuation ou d’un système équivalent.
L’assistance respiratoire à une victime au moyen de la cagoule d’évacuation peut être assurée de trois façons, décrites ci-après :
- mise en œuvre de la cagoule d’évacuation sur la 2ème sortie moyenne pression de l’ARI d’un membre du binôme
- mise en œuvre de la cagoule d’évacuation d’un sac d’assistance en air respirable (SAAR)
- mise en œuvre d’une cagoule autonome (à cartouche filtrante).
Dans tous les cas, il convient d’affecter cette mission au sauveteur disposant de la plus grande autonomie, et de :
- prendre contact avec la victime
- expliquer à la victime la procédure
- équiper la victime de la cagoule
- évacuer la victime vers un lieu protégé des effets du sinistre
Les sauvetages
Le sauvetage consiste à extraire une personne soumise à un danger vital et imminent dont elle ne peut se soustraire elle-même (GDO).
En revanche, la détermination des moyens permettant la sauvegarde des vies peut passer par des sous objectifs qui peuvent nécessiter une action préalable d’extinction ou de maîtrise du feu. Ainsi, il ne faut pas perdre de vue que la mise en œuvre d’un moyen hydraulique de façon simultanée facilitera les actions de sauvetage.
Il faut privilégier et utiliser dans un ordre de facilité d’emploi et de mise en oeuvre :
- les communications existantes
- les échelles à mains ou MEA
- le LSPCC
AIDES : Accéder, Isoler, Désenfumer, Explorer, Sauver/Sortir.
Les établissements
Les établissements de tuyaux constituent une phase quasi systématique des opérations d’extinction, même si certaines extinctions peuvent être menées à l’aide de moyens fixes ou mobiles de l’immeuble concerné (RIA, colonne sèche ou humide) ou même des moyens mobiles portables (extincteurs, seaux pompes, couvertures…).
Rappel des règles d’établissement et d’utilisation des tuyaux :
- employer le moins de tuyaux possible
- éviter :
- l’enchevêtrement des tuyaux
- de faire des torsions, des plis, des coudes
- si possible, de couper les rues
- ouvrir et fermer doucement les vannes pour éviter les coups de bélier dans les établissements
- en période de gel, ne pas fermer complètement les lances pour que l’eau ne gèle pas dans les tuyaux
- serrer le plus près possible du trottoir
- ne pas faire passer les tuyaux sur des décombres brûlants ou des objets coupants
- attention aux chutes de matériaux
L’établissement idéal est donc celui qui répond aux besoins, se fait rapidement et en sécurité (dos au feu ou N-1), avec une économie de personnels et d’efforts. Ainsi, les modes de conditionnement (tuyaux en couronne, écheveaux, en « O », en sac, sur dévidoir…) et les modalités afférentes, permettent de réaliser des établissements plus rapidement, avec moins de fatigue, tout en évitant la dissociation du binôme et en réduisant son temps de présence sans eau (vulnérabilité) en zone d’exposition aux risques (au point d’attaque notamment). Il ne faut pas oublier que c’est le terrain qui commande, on ne pourra jamais prédéfinir un établissement « type », il faudra toujours s’adapter.
Attaque et actions contre le feu
Cet article ne peut pas synthétiser l’ensemble du GDO INC. Cependant, il faut conserver à l’esprit que le C/A a l’initiative absolue des mesures à prendre et des actions à mener tant qu’il est le 1er COS (attente du Chef de Groupe).
Ainsi, il lui revient de :
- déterminer la « part du feu » et rechercher à sauvegarder les parties importantes (ex : bureaux dans un entrepôt)
- prioriser la lutte contre les propagations vers les parties les plus menacées sans écarter l’attaque du foyer principal
- définir quel type d’attaque il souhaite mener > extérieure, intérieure, atténuation, massive, etc…
- choisir le ou les point(s) d’attaque qui correspondent aux emplacements du/des porte(s)-lance(s) désigné(s)
- prévoir les itinéraires de repli et de secours et faire préparer les échelles en façade à l’extérieur
Il existe des dizaines de techniques d’action pour lutter contre un incendie, elles ont toutes une action commune, endiguer la propagation de l’incendie et le stopper. Cette action est possible en atteignant ces points :
- refroidissement des gaz chauds
- atténuation du rayonnement
- captation de l’énergie thermique
- suppression d’un élément du tétraèdre du feu (voir article Feu parties 1 et 2)
En concertation avec le chef d’agrès incendie, en fonction de l’action à mener et en application des principes décrits dans le guide de doctrine opérationnelle sur les incendies de structure, le chef d’équipe choisit le type d’établissement adapté à la situation (sac d’attaque, dévidoir, tuyaux en écheveaux, …), ainsi que la manière d’utiliser sa lance. Ce choix repose en général sur les éléments suivants :
- lecture du feu
- lecture bâtimentaire
- analyse des activités au sein de ce dernier (habitation, activités tertiaires, industrielles, ERP, …)
Il participe également à la reconnaissance permanente dans la structure, afin d’adapter la réponse opérationnelle aux enjeux et aux contraintes identifiées. Il complète le matériel en fonction de la mission. Il veille au maintien des conditions de ventilation determinées (anti ventilation, ventilation d’attaque). Le porte-lance rend compte régulièrement au chef d’agrès du résultat de ses actions et des éventuels besoins complémentaires.
Le porte-lance prend les décisions nécessaires à la préservation de la sécurité du binôme, en collaboration avec son équipier et son chef d’agrès et en particulier :
- l’ouverture sécurisée des ouvrants
- le placement judicieux dans le sens de tirage, en amont du foyer (la zone entre le foyer et le sortant doit être évitée)
Avant de pénétrer dans un local, le porte-lance doit :
- se placer dans la position la plus basse possible, à l’écart des effets éventuels d’un phénomène thermique
- rechercher les signes d’alarme significatifs des accidents thermiques et rendre compte à son chef d’agrès en cas de nécessité
- prévoir un chemin de repli jusqu’à une zone de sécurité
- s’assurer que les conditions sont remplies pour pénétrer dans le local
Lorsqu’il pénètre dans un local, le porte-lance doit :
- explorer le local dans la position la plus basse possible, par avancées successives, en évitant de rester dans le sens du tirage et en mettant en œuvre les techniques d’extinction adaptées à la situation
- adapter le jet de la lance en respectant le débit commandé
- se replier en cas d’une baisse anormale d’arrivée de l’eau à la lance et rendre compte
- utiliser l’eau strictement nécessaire à l’extinction
La ventilation
Un feu doit ventiler, très bien, bien, peu ou très peu mais il doit ventiler faute de quoi il s’éteint.
La ventilation opérationnelle sur un incendie ne se résume pas à l’usage des moyens de ventilation mécanique et/ou électrique des SP. Il s’agit d’un concept qui permet trois actions principales :
- Protéger
- Désenfumer
- Attaquer
Parmi les techniques utilisées, nous retrouvons : l’anti-ventilation, la VPP (ou VO), le désenfumage naturel ou forcé, la protection par surpression, la ventilation hydraulique, le tirage… L’utilisation des moyens déjà existants est à privilégier en première intention pour une rapidité d’exécution. Les dispositifs de prévention à demeure tel que les « tirez-lâchez » (skydomes) permettent de libérer les bouchons de fumées et de protéger la cage d’escalier. En l’absence d’un skydome, il faut privilégier d’ouvrir/casser une fenêtre située en haut de la cage d’escalier, ou en dernier recours un appartement.
La mission de vérification ou de création d’un exutoire est primordiale. En effet, l’évacuation d’un bouchon de fumées modifiera l’ambiance de l’intervention, réduit les risques pour les personnes et de voir apparaître un embrassement par l’accumulation des gaz chauds.
Le binôme doit se munir d’une gaffe et/ou d’un halligan-tools pour procéder à la création d’un exutoire si ce dernier est inexistant ou n’a pas correctement fonctionné.
La protection
Dans ces actions de protection, on peut différencier celles qui consistent à protéger les biens des effets directs du feu et des fumées, de ceux qui résultent de la lutte contre l’incendie tels que les dégâts des eaux et les éventuelles conséquences de la coupure de fluides (électricité, …).
Elle peut aussi avoir pour objet de préserver des biens matériels, dont la perte peut entraîner une forte complication de la vie des sinistrés dans la phase de retour à la normale. Il peut s’agir d’objets tels des clefs, de documents administratifs, justificatifs… Ceci est vrai pour des particuliers mais bien sûr aussi pour des entreprises (fichiers clients, comptabilité…).
La protection peut-être également une mission menée simultanément à une phase d’attaque lorsque les secours interviennent dans un bâtiment institutionnel ou un musée avec un Plan de Sauvegarde des Oeuvres (voir article PSO).
Des bâches en polyane, aspirateurs, boudins ou tout autres matériels servant à limiter les dégâts causés par l’eau d’extinction sont à utiliser sans modération.
Le déblai et dégarnissage
Le déblai et le dégarnissage, permettent de faciliter et de terminer l’extinction. Ainsi, on élimine au maximum les risques de reprise du feu. La phase de déblai est propice aux expositions des personnels aux toxiques gazeux, aux accidents dûs à la fragilisation des structures. Bien souvent, ils sont effectués par des SP ayant participé aux phases initiales de l’intervention (fatigue, baisse de vigilance, difficulté à porter et faire porter l’ARI par exemple).
C’est pourquoi, il est souhaitable que les opérations de déblai puissent être entreprises après un échange entre le COS, un officier formé et/ou sensibilisé à la RCCI (s’il en existe dans la structure), l’OPJ, voire éventuellement l’autorité judiciaire, le propriétaire, l’assureur…
Si l’objectif du déblai est d’atteindre l’extinction définitive du feu, la connaissance des matériaux et modes de construction est fondamentale pour orienter les choix méthodologiques et techniques.
Lors d’une phase de déblai, il est important de délimiter une zone d’extraction des gravats (rubalise). Cette zone doit être réfléchie afin de ne pas causer d’autres dégâts et de préserver le potentiel des équipes. Il ne faut pas négliger l’utilisation de la caméra thermique pour s’assurer qu’aucun point chaud ne subsiste. Cependant le chef d’agrès incendie ne doit pas se reposer uniquement sur ce matériel et doit mener des reconnaissances poussées pour éliminer tout risque. Il ne faut pas hésiter à dégarnir les plinthes, les poutres et tous les matériaux qui pourraient se consumer lentement et causer un nouveau départ de feu.
La préservation des traces et indices (RCCI)
La préservation des traces et indices contribue à répondre à trois principaux objectifs :
- Faciliter l’identification de la manière dont le feu a débuté et s’est propagé. Il s’agit là d’un aspect entrant dans un processus qui contribuera à déclencher de manière précoce le système assurantiel, voire juridique, permettant au sinistré et aux potentielles victimes de revenir plus rapidement à une situation acceptable;
- Identifier les comportements ou les équipements à risque (améliorer l’éducation des populations et participer à l’évolution des technologies);
- Alimenter le retour d’expérience et l’amélioration continue des pratiques de la communauté des pompiers (français et internationaux).
Elle est d’autant plus efficace qu’elle est pratiquée de façon précoce par le COS et les équipes engagées qui doivent veiller à préserver, dans la mesure où cela ne nuit pas à la qualité de l’opération de secours, tout ce qui peut faciliter le travail d’analyse post-opération. En complément des équipes de secours qui doivent être sensibilisées à ces pratiques, certains SIS s’appuient sur des sapeurs-pompiers investigateurs qui pratiquent la recherche des causes et circonstances de l’incendie (RCCI) et disposent d’outils permettant d’analyser de manière plus précise, ces aspects de l’intervention.https://www.youtube.com/watch?v=87jwsJiQZp0https://www.youtube.com/watch?v=w8vQ_xf3V3c
La surveillance
La surveillance permet de s’assurer de l’absence de reprise de feu et aussi de s’assurer que des tiers ne viennent pas s’exposer aux risques avant que les sinistrés ou les services municipaux n’aient pu mettre en place les protections physiques et avertissements adaptés. Le gardiennage des lieux n’est clairement pas une mission des SDIS mais les COS se doivent d’éclairer les sinistrés, à défaut l’autorité locale, sur les mesures qu’il convient de prendre pour éviter des accidents.
La surveillance doit être effectuée en continue sur le site ou grâce à des rondes, avec les moyens permettant de répondre à toute évolution défavorable. En situation courante, l’absence de point(s) chaud(s) vérifiée pendant une période de deux heures peut permettre au COS de considérer le feu comme totalement éteint. Il est indispensable de ne pas sous-estimer le risque d’exposition à l’accident (chute, blessure, brûlure, …) ou aux toxiques (polluants de l’air et des surfaces souillées) pendant cette phase opérationnelle.
APRÈS
La réhabilitation des Hommes et reconditionnement
Dans le cas des opérations importantes une sectorisation fonctionnelle complémentaire, laissée à l’initiative du COS, doit prendre en compte le soutien sanitaire opérationnel adapté.
Le principe de « marche en avant » doit être recherché dans l’organisation de la zone de soutien.
Lors des phases de repos, après retrait des EPI, il est préconisé l’usage de lingettes nettoyantes ou d’eau froide et de savon pour se nettoyer le visage, le cou, les mains avant de s’hydrater et de se restaurer. Les yeux et la bouche peuvent être lavés. L’action de se moucher le nez pour se débarrasser des mucosités est préconisée.
Pour réaliser les procédures, il faut veiller à identifier un espace dédié au nettoyage dans la zone de soutien.
- Hydratation : elle permet non seulement de compenser les pertes en eau et minéraux, mais favorise également la récupération et limite les blessures (penser à boire avant et après l’effort).
- Hygiène : elle est primordiale non seulement pour le pompier lui-même, mais également pour son entourage (hygiène corporelle, nettoyage ou échange des vêtements). Au retour d’intervention, il faut donc prendre une douche et changer de TSI et d’EPI (lavage des effets sales).
- Repos : une phase de repos physiologique est à envisager en fonction de l’intensité et de la durée du travail sous ARI. La journée de travail au retour en centre de secours, peut être adaptée dès lors que l’opération a nécessité un engagement physique important et/ou des relèves.
Le conducteur de l’engin-pompe peut assurer la fonction de logisticien. Il prépare :
- un parc matériels propres,
- un parc matériels souillés,
- une zone de nettoyage des intervenants et des matériels
Il fournit à ses équipiers les matériels demandés pour éviter le transfert de polluants à l’intérieur du véhicule.
Le déshabillage des personnels ayant des tenues et équipements souillés doit être réalisé en amont de la zone de soutien par des sapeurs-pompiers disposant d’une protection respiratoire (FFP2, FFP3, cagoule de protection filtrante, masque à cartouche filtrante ou ARI), oculaire et cutanée adaptée au niveau de souillure et des gants à usage unique. Un lavage systématique des mains et des effets chaussants doit être effectué avant de réintégrer le véhicule. Le véhicule, notamment l’espace cabine, doit faire l’objet également d’un nettoyage.
Exemple de processus de lavage et séchage de tenues de feu. (Caserne aux USA, photos @Rescue18)
Les opérations à mener de retour au centre de secours
De retour au centre de secours, le chef d’agrès doit procéder à un rassemblement de type « A vos rangs » afin de :
- vérifier la bonne santé de ses personnels
- s’assurer du bon état des EPI
- faire procéder au reconditionnement, décontamination et lavage des matériels et engins
- imposer à ses personnels de prendre une douche et de se restaurer
- réaliser un « RETEX/analyse à chaud » de l’intervention afin de rappeler les points importants de l’intervention, souligner les actions positives et analyser celles qui méritent une action corrective
- féliciter les personnels méritants ou corriger ceux ayant fait des erreurs
- rédiger son rapport de sortie de secours
- rendre compte à son chef de centre de l’intervention, des points positifs et négatifs et proposer d’éventuelles récompenses
Sources et crédits : GDO et GTO de la DGSCGC / bibliothèque ops SF / ENSOSP et Valabre / Leader